Sur les traces des dinosaures à Torotoro, Bolivie

Après ces deux semaines de volontariat dans la jungle, qu’il est difficile de sortir de notre bulle ! Même pas une nuit de repos, et hop on enchaine un trajet « multimodal ». Un bus de nuit jusqu’à La Paz, 20 min de marche en ville, 20 min de téléphérique, un bus de jour pour rejoindre Cochabamba, un taxi et un peu de marche. Pour se reposer pendant 2 jours, nous louons un petit studio dans une résidence étudiante (ça rappelle des souvenirs !). Nous ne visiterons la ville que furtivement lorsque nous nous rendons dans un petit terminal de bus de l’autre côté du centre ! 

Notre voyage se poursuit donc au cœur d’un canyon immense et désertique. Notre combi, aménagé comme transport public, dépose de-ci de-là des passagers qui rentrent chez eux ou qui rendent visite à leurs familles, dans des villages coupés du monde, hors du temps. L’oiseau du soir nous enveloppe, le crépuscule ouvre grand ses ailes et donne à cette vallée des couleurs irréelles. Nous arrivons de nuit à Toro-toro, petit village perché dans la montagne, au-delà duquel s’étend le parc national du même nom.

Jurassic Park

Si cette bourgade du bout du monde connaît un essor touristique important (bien que fort impacté par la pandémie), c’est qu’il héberge des traces de dinosaures ! Ces sauriens immenses foulaient jadis ces terres marécageuses, et l’asséchement de ce terrain argileux a parfaitement conservé cette image figée de leur passage. Des scientifiques sont venus dans les années 70 pour confirmer leur authenticité et effectuer des recherches plus approfondies. 

On loge au Margaritas Hostel (le moins cher sur Booking), tenu par Mateo, un Suisse adorable, qui s’est installé en Bolivie depuis 1998. On profite également de son bar-resto juste en face sur la petite place pour boire une petite bière en arrivant. Le lendemain, on se rend à 7h devant la maison des guides, pour faire une excursion dans le parc. C’est énervant, mais toutes les balades à l’intérieur du parc doivent être obligatoirement faites avec un guide.

Vous commencez à nous connaître, on aime bien être en autonomie, donc on râle un peu, mais on s’y plie… On forme un groupe de 6, avec deux sœurs québécoises Julie et Rosalie, un français, Eloi, et Juan-Carlos, un bolivien. Le départ se fait en 4×4 sur des pistes en mauvais état, et très vite, on sent que le chauffeur gère mal son véhicule et son point de patinage, la voiture surchauffe et n’a aucune puissance ! Il s’arrête au milieu des côtes, et on doit mettre une pierre sous chaque roue, pousser la voiture et dès qu’elle fait 3m avant de caler, vite remettre des pierres ! Finalement, nous parvenons à atteindre un col et avec 1h de retard, nous arrivons à destination ! 

Tour préhistorique supervisé…

Le point de vue sur la vallée est magnifique, on se croirait un peu devant le Grand Canyon. Des épineux jaillissent des pierres ocres aux veines blanches et noires. La géologie particulière de cet endroit crée un spectacle fascinant : la Ciudad de Itas, la « cité de pierre » en guarani. Le mélange d’une roche dure granitique et d’une autre plutôt calcaire, a créé, grâce à une érosion millénaire, des voûtes, des grottes, des cathédrales de roches aux formes et aux couleurs fantastiques. On s’aventure dans ce labyrinthe sculpté par le temps, en se faufilant dans d’étroits passages, en levant haut la tête pour tenter d’apercevoir le ciel. Qui dit guide obligatoire dit pause photo obligatoire… Ça nous saoule très vite et on échappe aux suivantes. 

On trouve également à plusieurs endroits des peintures rupestres, à moitié effacées par le temps et par l’homme. Découverte officiellement il y a peu de temps seulement, elles sont aujourd’hui protégées mais pas encore restaurées. On aperçoit un lama, la lune, le soleil, une main et des étoiles. Elles sont faites avec un mélange de graisse et de sang animal, et d’une plante. Les scientifiques les datent tout de même autour de -4000 !

Dinosaures et spéléo

Après notre repas de midi, nous changeons d’endroit dans le parc et le guide nous entraine dans une petite vallée où coule une tranquille rivière. On découvre des traces de dinosaures sur les bords du chemin, qui nous laissent un peu froid – elles ne sont pas très impressionnantes… Une large paroi apparaît alors, ainsi qu’une immense ouverture à sa base. Il s’agit de la grotte Umajalanta qui signifie « l’eau qui se perd ». C’est la plus grande grotte de Bolivie, de plus de 7 km de long !

Équipés d’un casque et d’une frontale, on s’aventure le long de la rivière, avant de la quitter puis de la retrouver quelques salles plus loin. La lumière disparaît rapidement, et on se retrouve dans des ambiances mystiques, avec des stalactites et stalagmites, qui parfois se rejoignent pour former les piliers de la terre. Seul le goutte-à-goutte infini nous berce et nous guide de loin. On ne découvre qu’une infime partie de la grotte, mais l’activité est vraiment sympa et on se plonge aisément dans la peau d’un spéléologue aventurier.

Le soir, on débriefe tous ensemble au bar de Mateo autour d’une bière artisanale. Nous restons avec Eloi et Manon à discuter un long moment, et on met la main à la pâte pour éplucher les patates et manger une bonne tartiflette ! C’est comme à la maison chez Mateo 😉

Aventure d’un soir

C’est d’ailleurs lui qui nous arrange une petite expédition pour notre dernier jour à Toro-toro. Il appelle un copain à lui, guide du parc, pour que l’on aille tous ensemble passer une nuit en bivouac. Je conduis à l’aller le vieux 4×4 de Mateo, un Toyota Land Cruiser, pour nous rendre au bout d’une route perdue au milieu de nulle part. Nous sommes donc 5, avec Eloi et Manon, notre guide Victor et une autre française, Ophélie. On monte jusqu’à la crête où nous pensions camper, mais en arrivant en haut, c’est une falaise vertigineuse qui plonge sous nos pieds. De l’autre côté s’étend un paysage de montagne, de canyons, des milliers d’hectares sans la moindre habitation.

On revient un peu en arrière pour installer les tentes, aller chercher du bois et préparer un feu. La soirée est sympa, on écoute de la musique en discutant un peu en français et en espagnol, nous faisons cuire des cuisses de poulet directement sur le feu, et notre guide nous raconte quelques histoires intéressantes, de pots-de-vin pour la police, ou comment il est retourné dans la vallée pendant la pandémie pour vendre des papayes avec son frère, afin de survivre.

Lever de soleil au mirador des condors

Au réveil à 5h30, on grimpe afin de profiter du lever de soleil sur cette immense zone aride bolivienne. La lumière est magnifique, on imagine sans peine un film de Indiana Jones ou de Jurassic Park être tourné ici ! Mais de retour au village, la douche est froide. Notre Mateo a passé la nuit chez son voisin, qui a perdu sa maman la veille au soir.

Les proches et la famille se sont donc réunies dans la maison pour une veillée funèbre. Les femmes s’occupaient du corps de la mère, le lavaient et l’habillaient, tandis que les hommes jouaient aux cartes dans la pièce d’à côté, en buvant de l’eau-de-vie. Autant vous dire qu’à 8h du mat’, il était pas très frais, Mateo ! 😅 Il nous a donc demandé de garder le bar le temps qu’il se repose un peu… Nous partons en début d’après-midi avec Eloi, en colectivo jusqu’à Cochabamba, puis en bus de nuit (ultra confo !) jusqu’à Sucre, notre prochaine étape.

Théo