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Cap-Vert, escale historique sous les tropiques

Navigation des Canaries au Cap-Vert :

  • 830 milles, 8 jours
  • 2 jours sous moteur faute de vent
  • 5 bancs de dauphins et 1 banc de globicéphales noirs
  • 2 dorades coryphènes et 2 bonites pêchées et dégustées
  • 1 anniversaire en mer


La traversée depuis les Canaries a été plutôt tranquille. La mer était calme et les vents ne dépassaient pas les 15 nœuds.

Alors que nous pensions faire la route à 3, le jour du départ nous avons finalement embarqué Jade, une bateau-stoppeuse française de 32 ans, qui venait de se faire lâcher par son équipage. Heureusement qu’elle était là pour faire les quarts de nuit avec nous, à 3 ça aurait été vraiment sport et épuisant. Malgré son mal de mer des premiers jours, elle a apporté de la bonne humeur et de la légèreté au voyage. Et aussi un brin de musique avec son ukulélé.



Atterrissage au Cap-Vert

Je vous emmène maintenant découvrir le Cap-Vert, ces îles mystiques des tropiques, dont certaines (malheureusement pas toutes) sont encore épargnées par le tourisme de masse.

Nous sommes arrivés au petit matin. Théo, qui était de quart, vient me réveiller à 8h. Emerveillée, je découvre l’île de Santo Antao à tribord, majestueuse et très montagneuse avec son sommet à 1979 m. A bâbord, l’île de Sao Vicente apparait plus petite et moins haute. Il reste encore une bonne heure avant d’arriver à Mindelo. Mais plus on se rapproche, plus on peut voir les détails de cette terre inconnue. Les falaises impressionnantes plongent dans l’eau, les petits villages blancs se dessinent sur la terre noire.

Jade sur le bateau, pour l’atterrissage à Mindelo

En arrivant par la mer, on ne peut s’empêcher d’imaginer ce qu’ont pu ressentir les colons en découvrant ces terres inhabitées, une sensation magique (digne d’un Pirates des Caraïbes ! 😛).




Découverte de Mindelo

Après un passage à la douane pour nous enregistrer, on part à la découverte de Mindelo. Cette ville est un mélange de culture africano-européenne, comme l’ensemble de l’archipel du Cap-Vert. Découvert par les Portugais au 15è siècle, les îles sont rapidement devenues un pilier central du trafic d’esclaves en partance pour les Amériques, et plus tard un lieu d’escale pour de nombreux marins afin de se ravitailler. En côtoyant également les prostituées dans de nombreuses maisons de charmes, ils ont participé à cet incroyable métissage.



Aujourd’hui, Mindelo est toujours pleine de vie. Entre les différents marchés, les petits vendeurs de rue, les restaurants et bars, les mendiants de tout âge, les chiens errants et cette vie toujours en extérieur. Mindelo c’est aussi la ville natale de Césaria Evora, la célèbre chanteuse de morna. On ressent son influence, il y a des portraits d’elle un peu partout, sur les billets de banque ou en street-art. La musique fait intégralement partie de la vie des cap-verdiens. En se baladant dans la rue, on peut parfois voir un poste radio posé devant une maison, une enceinte attachée au guidon d’un vélo et des concerts un peu partout.

Fresque de Césaria Evora
Marché aux poissons



Il est 16h et nous avons faim. Pensant prendre un petit en-cas dans un restaurant typique, on commande tous les 4 la fameuse Cachupa, plat local à base de pois chiches et haricots blancs et rouges accompagnés de poisson, viande ou omelette. Les portions sont énormes, aucun de nous ne termine son assiette ; pour un repas léger c’est raté ! On apprendra plus tard que ce plat est habituellement servi au petit déjeuner, on peut vous dire que ça tient au corps et donne de l’énergie pour toute la journée !

Les premiers jours passent vite, entre nettoyage et réparation du bateau. Franck monte au mât afin de réparer la drisse de la grand-voile, et Théo plonge pour nettoyer la coque du bateau. On décide de se prendre une nuit en hôtel afin de se retrouver un peu tous les deux. Tu parles d’une soirée romantique ! Un couple de français qui nous suit sur Facebook, nous contacte car eux aussi se trouvent à Mindelo et proposent de boire un verre un de ces jours. C’est samedi soir et l’on vient de passer 8 jours sur un bateau coupés du monde, alors on leur répond qu’on est dispo dès ce soir !

Franck en haut du mât
Théo qui gratte la coque



On se retrouve dans un bar huppé de Mindelo, juste devant le port. Une autre facette de la ville s’offre à nous, rendez-vous des riches Cap-verdiens sur leur 31, parés à faire la fête. Population très mixte car nombres d’occidentaux sont présents, ceux dont le bateau est au port ou au mouillage. On se retrouve donc à une table de 10 personnes, à parler navigation, transatlantique, pêche et météo. La soirée est très agréable, entre propriétaires de bateaux et bateau-stoppeurs comme nous, ça fait du bien de se resociabiliser un peu 🙂 .

Le bar huppé de Mindelo



La ville de Mindelo n’étant pas très grande, on s’y repère vite, et on recroise plusieurs fois les même visages. Grâce à Jade, notre co-équipière (qui en 4 jours était devenue amie avec la moitié du port car elle continue de chercher un bateau pour traverser au plus vite l’Atlantique), on fait aussi des rencontres improbables. Comme ce cap-verdien qui souhaite rejoindre la France par la mer et qui a donc décidé de chercher un premier bateau pour les Antilles, puis une fois là-bas un deuxième pour la France. Au vu de la latitude du Cap-Vert et du sens des vents, il est impossible de remonter en ligne droite vers l’Europe !

Santo Antao

Départ pour 2 jours de randonnées sur l’île de Santo Antao. Levés à 6h pour rejoindre le ferry, ça nous fait tout drôle de monter dans cette énorme bête après s’être habitués à notre « petit » bateau de 12,5 m.

A peine débarqués, on se fait héler de tous les côtés par des conducteurs d’aluger, les taxis collectifs, qui sont par dizaines à proposer les mêmes trajets, au même prix. Pas facile de choisir, la concurrence est rude. Une fois installés dans l’un d’eux, il faut attendre qu’il soit rempli avant de partir. Alors on patiente le temps que d’autres touristes et cap-verdiens montent à bord. Mais le trajet n’est pas direct, le conducteur en profite pour faire des livraisons à droite à gauche ou simplement s’arrêter dire bonjour à un ami.



Notre randonnée pour la vallée de Paul commence au village du même nom, au niveau de la mer. 5h et 960 m de dénivelé positif, voilà ce qui nous attend. La vallée est magnifique, verdoyante, bien irriguée contrairement au reste de l’île. Les fruits exotiques sont abondants, on y retrouve des bananes (vraiiiiment beaucoup de bananiers !), papayes, goyaves, oranges, pommes, fruits de la passion, café, fruits du jaquier, et d’autres que l’on n’a pas su identifier ! La randonnée est belle mais très fatiguante, surtout en s’étant levés aussi tôt, mais je peux vous dire qu’on était heureux d’être là. D’autant plus après les 4 jours passés à Mindelo où l’on ne pouvait voir que les montagnes désertiques de l’île. Mais aussi après notre séjour aux Canaries, voir autant de vert nous a fait un bien fou !



Lors de cette randonnée, on est confronté au mode de vie très rural des habitants. Une vie qui se partage entre les champs et l’élevage. La végétation luxuriante leur offre un certain confort et une production de fruits presque toute l’année. Mais les sécheresses sont fréquentes et ils ont élaboré tout un système d’irrigation afin d’y faire face. Ils reçoivent aussi une aide internationale importante, comme pour la construction et l’entretien de réseau d’irrigation, des routes et des hôpitaux.

Jade nous a dégoté un super plan pour passer la nuit en haut de la vallée, chez Ady et Juju. Un couple de cap-verdien tenant une petite guest-house avec 2 chambres. Lui parle français pourtant il n’est jamais sorti de son île, mais à force d’être en contact avec des francophones il est maintenant bilingue ! Quel plaisir d’écouter son histoire et celle de son île. La cuisine est assurée par sa femme, avec une grande partie de produits locaux, certains venants même directement du jardin 😀 ; nous sommes très heureux de voir que la gastronomie cap-verdienne ne se limite pas à la Cachupa ! On a pu déguster un ti-punch maison ainsi qu’un délicieux repas à base de poulet ou de poisson (appelé le « j’merégale » par notre hôte !). Je pense que l’on a passé une de nos meilleures nuits depuis un moment. A la fraiche, à 500 m d’altitude, dans le silence complet, avec seulement un coq qui sonnait les heures. En effet, pour notre 1ère nuit à Mindelo sur la terre ferme, on a été réveillé avec un violent mal de terre. Les yeux fermés, on pensait être sur le bateau en pleine tempête !

La vue sur Cabo de Ribeira, le village de Ady et Juju
Notre copieux repas

Afin de se retrouver un peu seuls avant les 15 jours de transat’, on décide de retourner une 2ème fois à Santo Antao. Départ pour le minuscule village d’Espongeiro, à 1380 m d’altitude. On a réservé 2 nuits à la guest-house « Casa Espongeiro », tenu par un français (un sacré personnage !), marié à une cap-verdienne.



On prévoit une randonnée sur le plateau, face aux vallées du nord de l’île. Cette fois-ci, on découvre un paysage beaucoup plus sec, avec des petits villages isolés, parfois des maisons seules avec ânes, vaches ou cochons attachés à un simple piquet.



On passe deux soirées en très bonne compagnie avec un couple de flamands et deux amis suisses, avec qui les discussions et les fous-rires s’enchainent. La cuisine cap-verdienne nous régale encore une fois, et tout est local : les plats de viandes ou poissons sont accompagnés de légumes comme la courge, le chou mais aussi beaucoup de racines (igname, manioc ou patate douce). Et bien sûr nous avons eu le droit à un apéritif maison à base de rhum – fermenté avec des fruits – et comme digestif le fameux grogue : rhum pur fait maison !



Le départ pour la transat’ est dans 2 jours, il faut à nouveau préparer le bateau et faire les courses pour les 15 prochains jours. On passera un moment au marché et dans les différents magasins de la ville car ici, pas de grandes surfaces ! On ne trouve pas tous les produits que l’on souhaite, mais on s’adapte. Le bateau est plein, on attend notre nouvel équipier, Philippe un ami de Franck, qui arrive en avion. On fait le plein de saveurs, d’odeurs, de toutes ces petites choses que l’on ne trouve que sur la terre ferme.

Maintenant à nous l’océan, Martinique nous voilà !

Manon



11 commentaires

  • Léa Garrigues

    Super!! Je ne connaissais pas du tout Le Cap Vert, ça fait rêver. Ma cousine y est allée plusieurs fois car son copain y va exprès pour la pêche, apparemment il y a des spotincroyabless. Hate de lire la suite
    Bonne année et bonne continuation 😁
    PS : Ca existe vraiment le mal de terre??

    • jamais2sans-sacs

      Merci Léa, en effet les cap-vediens pêchent énormément !
      Et oui le mal de terre existe bien :p Une sensation d’être encore sur un bateau, pas stable sur tes pieds et cela peut même te faire tituber (on n’était pas à ce stade non plus :p ), et c’est encore plus prononcé dans un espace restreint, comme les wc, ou devant un écran d’ordinateur !
      Bises à toi et bonne année ! 😉

  • PATRICK TOUSSAINT

    Bonjour les aventuriers !
    Déjà des milliers de mille marins au compteur et de belles découvertes.
    Merci pour les détails donnés sur votre visite du Cap Vert !
    J’ai encore un peu voyagé avec vous en espérant pouvoir un jour trouver ces iles avec les mêmes envies de découverte que vous !
    Bonne mer pour votre prochaine traversée et à très vite pour vous lire!

    Patrick

  • Marcel ILTIS

    Reportage toujours passionnant
    Merci pour tous ces détails et ces photos qui nous permettent de voyager un peu avec vous …
    Bises à tous les 2
    Marcel et Corinne

  • chouvellon

    Le Cap Vert pour moi, c’est Cesaria Evora que j’ai eu le grand plaisir d’entendre en concert dans le Forez il y a assez longtemps. Vous suivre dans votre beau périple nous aide à supporter le temps hivernal et donne des envies de partance…Profitez des belles rencontres. Avez vous inscrit le Chili dans votre parcours ?

    • jamais2sans-sacs

      Ça doit être génial de voir Cesaría Evora en concert !
      Merci, bon courage pour le temps neigeux.
      Et oui pour le Chili, c’est la 2ème destination qui nous fait le plus envie d’Amérique du Sud après la Colombie 😉
      Bises

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