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Notre première expérience de navigateur – Du Portugal aux Canaries

La mer est calme, trop calme. Pétole depuis quelques heures. Le ronronnement du moteur est devenu un bruit de fond. J’en profite pour écrire un peu. A côté, Franck prépare un crumble aux pommes, Théo lit « La longue route » du navigateur (un peu fou) Bernard Moitessier, et Manu se repose. 

L’intérieur du bateau

Voilà 4 jours que nous sommes partis de Cascais, une petite ville touristique proche de Lisbonne. Nous avons bien avancé, il ne nous reste plus que 71 milles avant d’atteindre l’île de la Graciosa, notre 1ère étape aux Canaries.

La vie sur le bateau se passe bien, on est étonnés de voir à quel point nous avons pris rapidement nos marques et nos petites habitudes.

Lors des deux premiers jours, à la tombée de la nuit, Manu et moi avons eu le mal de mer… De nuit, nous perdons nos repères visuels, il n’y a plus d’horizon à regarder. La nausée nous empêche de manger le soir. Il faut que je reste sur le pont à chercher les étoiles du regard pour que cela commence à passer.

Nous avons trouvé un bon rythme, le midi et le soir après avoir cuisiné un peu chacun notre tour, on mange tous ensemble. 

Chaque soir, les couchers de soleil sont incroyables. C’est le bon moment pour faire un petit jeu de dés avec un apéro (sans alcool pendant la navigation !) ; ça deviendra vite une de nos petites routines.

Les quarts de nuit

Les quarts de nuit, c’est ce qui m’inquiétait le plus avant de partir. Franck nous avait déjà rassuré car il met le pilote automatique, nous n’aurons donc pas à barrer pendant 2h, simplement à s’assurer que le bateau ne dévie pas de son cap. Il nous explique aussi qu’au moindre doute, il faut le réveiller !

Le sommeil entre les quarts est un peu hachuré, le bateau grince et roule, les vagues tapent contre la coque. On entend aussi très bien le bruit du pilote automatique et celui du moteur lorsque le vent retombe trop pendant la nuit ou encore celui du groupe électrogène s’il faut recharger les batteries.

Le réveil est toujours difficile, il me faut un temps pour me rappeler où je suis et pourquoi le réveil sonne à 2h ou 4h du matin. Une fois enfilé toutes mes épaisseurs, (et oui, on est peut être dans le sud mais avec le vent frais et la tête dans le pâté, je m’équipe !) je sors pour prendre le relais et après un débrief des dernières heures de navigation, je me retrouve seule.

Le premier soir, on décide de faire les quarts ensemble avec Théo. 2h qui passent très vite. Il faut surveiller sur l’AIS (le GPS) ainsi qu’avec les jumelles, qu’aucun bateau n’arrive dans notre direction et si c’est le cas, dévier le cap afin que le point de croisement soit le plus éloigné possible. Mais de nuit, même à 4-5 km de distance un cargo de 300 m de long paraît très proche et immense.

Une nuit où j’étais seule de quart, un ferry apparaît sur l’AIS, il devrait passer proche, trop proche… J’analyse la situation mais il est très difficile de savoir si le bateau passera devant ou derrière. Je finis par aller réveiller Franck (qui dormait bien) pour savoir quoi faire. Au final, virement de bord et nous passons à moins de 1 mille du bateau (1 mille = 1,8 km). En regardant avec les jumelles, j’ai l’impression de pouvoir observer l’intérieur des cabines tellement nous sommes proches ! 

La nuit c’est aussi un moment où l’on se retrouve seul avec les étoiles, des ciels tellement pures et fascinants. Et on peut voir les étoiles qui changent de place au fur et à mesure que nous descendons au sud. C’est devenu une habitude lorsque je commence mon quart de retrouver la Grande Ours, Cassiopée, Orion, l’étoile Polaire. La lune se lève de plus en plus tard chaque nuit, et laisse un ciel sans aucune lumière jusqu’à ce qu’une tache orangée se lève au nord et monte doucement dans le ciel. 

S’il n’y a rien de particulier à faire lors du quart, je lis, je mange (Franck nous a aussi fait des pancakes, un régal à grignoter de nuit !). Théo, lui, me disait qu’il adore barrer de nuit et être maître du bateau dans le noir, un sentiment de liberté peut être ? 😉

Les bestioles rencontrées

Les journées s’enchaînent mais ne se ressemblent pas. Le premier jour, Franck décide de mettre la canne à pêche à la traîne, et moins d’1h plus tard, ça mord ! Théo qui était à la barre doit réduire l’allure, je vais chercher l’épuisette et Franck remonte une magnifique bonite, de la même famille que le thon. Manu est chargé de la tuer et la découper. Ce soir ça sera du poisson au menu ! (C’était le 1er jour de navigation, alors je n’ai rien mangé… Merci le mal de mer !)

La bonite sur le feu
La daurade coryphène avant qu’elle se libère

Un autre jour, alors que Franck était parti se reposer après avoir mis à nouveau sa canne à pêche, un poisson mord à l’hameçon ! Je me dépêche d’aller réveiller Franck, il récupère la canne et après avoir eu du mal à rapprocher le poisson qui passait sous le bateau, on aperçoit une incroyable daurade coryphène ! Un poisson bleu fluo à la queue jaune d’au moins 1m de long. Et le débat commence. Franck veut la tuer et la manger, mais le reste de l’équipage n’est pas aussi catégorique. « Il est beau ce poisson quand même ! Et puis ça fera trop pour nous non ? On arrive bientôt, on risquerait d’en gâcher… ». A force de tergiverser, la daurade s’impatiente, saute dans tous les sens et finit par casser le fil et se libérer ! Au moins, nous n’aurons pas à prendre de décision. Il faut juste espérer qu’elle survive malgré l’hameçon… 

Le dernier jour de navigation, alors que l’on désespérait de voir d’autres animaux, un banc de dauphins passe à une dizaine de mètres du bateau ! Mais ils ne sont pas joueurs, comme Franck avait pu nous le raconter, et ils restent très loin de nous. Ca reste incroyable de les voir aussi nombreux ! Ce même jour, alors que la mer est d’huile et le vent complètement retombé, on se demande ce que peuvent être ces taches sombres sur l’eau. Et là, une tortue passe tout près du bateau et nous montre sa tête ! On remarque alors qu’il y en a des dizaines, espacées de plusieurs centaines de mètres. Elles remontent à la surface pour respirer puis se laissent porter par le courant et replongent. 

Le banc de dauphins au loin
Une tortue qui sort sa tête

L’arrivée sur l’île de la Graciosa

Je termine cet article sur la terre ferme, à Lanzarote. L’arrivée aux Canaries était assez spectaculaire. Nous avons commencé à apercevoir les îles pendant la dernière nuit de navigation. Un halo lointain de lumière les entourait. Pendant mon quart, je pouvais voir les lumières d’une ville (certainement sur Lanzarote) apparaître petit à petit. Au réveil, vers 7h du matin, Franck est venu toquer à la cabine car nous arrivions. Excités, nous sommes sortis en trombe. Spectacle magique avec la lumière du petit matin, nous naviguons déjà tout proche des premiers îlots non habités. Des falaises noires et abruptes, impressionnantes. Franck nous avait décrit l’île de la Graciosa comme désertique, encore méconnue des touristes. Le jour se lève et nous pouvons voir les dizaines de bateaux déjà au mouillage devant la plage. La déception est visible chez lui alors que nous sommes encore ébahis devant la beauté du paysage. Finalement, nous posons l’ancre à l’arrière de tous ces bateaux afin d’avoir uniquement la vue sur l’île de Lanzarote un peu plus loin.

Les îlots désertiques
La Graciosa et Lanzarote

Une fois le bateau à l’arrêt et rangé, une première baignade s’impose! Tout le monde en maillot et on plonge depuis le pont. Il est 9h, l’eau est encore un peu fraîche, mais ça donne le ton pour les prochaines semaines ! 

La plage du mouillage à la Graciosa

Manon

Retrouvez ici notre vidéo sur nos premières expériences en bateau 😉


5 commentaires

  • Toussaint patrick

    Bravo pour vos premiers miles marins
    Nous n étions pas inquiets ! Vous vous adaptez très bien aux situations du voyage.
    Je poursuis la suite de vos aventures avec toujours autant de plaisir
    Profitez et vivez pleinement tous ces moments
    Patrick
    Un ami de ton papa

  • Dom Valette

    Merci Théo, Manon de nous faire rêver.
    Quel beau voyage vous entrepenez et profitez bien de chaque instant.
    Un ami de Christian et Martine.
    Dom

  • René

    De vrais talents d’écriture pour raconter cette première traversée. C’est bien agréable de te lire et de partager tous ces beaux moments. Je goûte avec vous le plaisir de la navigation et l’immersion dans l’environnement maritime. …vivement la suite !
    Bisous
    René

    • jamais2sans-sacs

      M : Merci pour ton commentaire, c’était une très belle expérience. A voir si la suite se passera aussi bien. Notre prochaine étape en bateau est Canaries – Cap vert!
      Grosses bises à toi, j’espère que tu vas bien :)!

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